Voiture électrique : Volkswagen investit 12 milliards dans le made in Europe

Les voitures électriques devraient représenter jusqu'à 25% du marché d'ici 2025. Crédits photo : Pexels

Volkswagen a signé lundi 15 mars un chèque de 12 milliards d’euros à la compagnie suédoise Northvolt. L’objectif : doter, chaque année pendant dix ans, environ 750.000 véhicules de la marque allemande d’une batterie électrique. La commande entre Européens est sans égal. Et si un géant de la batterie était né sur le Vieux Continent ? 

De simples batteries scooters et de trottinettes électriques, l'entreprise Northvolt est promue chargée de l’alimentation d’une partie de la flotte de Volkswagen, 2e constructeur mondial avec 9,3 millions de voitures mises sur les routes en 2020. Northvolt a pris la lumière lundi 15 mars, lorsque la compagnie suédoise, déjà détenue à hauteur de 20% par le géant allemand, a reçu une commande de batteries pour près de 12 milliards d’euros sur dix ans

Des opportunités grâce au boom de la voiture électrique

Volkswagen, toujours sali par l’affaire du Dieselgate, souhaite proposer 47 modèles électriques au public en 2025. Au total, 12 millions de véhicules électriques, soit environ 15% du marché, pourraient être vendus dans le monde par les constructeurs à cette date, estime le cabinet de conseil Deloitte

Pour satisfaire les demandes du constructeur de la Polo, Northvolt mise notamment sur son usine grande comme 280 terrains de footballs installée en Suède. Inaugurée à la fin de l’année, cette dernière devrait équiper 600.000 voitures électriques par an à partir de 2024, date à laquelle l’usine aura trouvé son rythme de croisière. Problème, la commande de Volkswagen porte sur environ 750.000 voitures : l'entreprise suédoise est donc priée d’augmenter ses capacités de production. D’autant que Volkswagen n'est pas son seul client.

La Suède a du talent

La production est loin du compte mais l’immense usine suédoise sera à son inauguration la seule du genre en Europe - en attendant d’en voir fleurir d’autres un peu partout sur le continent. L’entreprise bénéficie de quelques cartes face aux mastodontes asiatiques du secteur. "Ils sont européens et produisent avec de l’énergie propre, de l’éolien et de l’hydraulique, qui a un coût faible, confie un expert du secteur de l’énergie, sous couvert d’anonymat. Ils sont très compétitifs sur le terrain énergétique." Manière de réduire les émissions de CO2 alors que la construction d'une batterie est loin d'être neutre en la matière. 

Le groupe maîtrise aussi mieux sa chaîne d’approvisionnement, qui se limite à la recherche des matières premières (cobalt, nickel, lithium…). "Contrairement à une usine traditionnelle de batteries, les nôtres produisent aussi le matériel actif qui sert à la fabrication des cellules de ces batteries", explique aux Echos Peter Carlsson, PDG de Northvolt et ancien de Tesla.

Reste à savoir si en matière d’autonomie, la batteries suédoises pourront rivaliser avec les plus performantes du marché, celles de Tesla en tête. Faute de données concrètes, le rachat de Cuberg, début mars, va dans le sens d’une recherche de rupture technologique sur ce sujet : la start-up américaine produirait des batteries jusqu’à 80% plus performantes que celles actuellement disponibles sur le marché. 

Le géant vert 

Si la bataille de la batterie se joue en Asie, les Européens qui n’assurent que 3% de la production à ce jour, pensent encore pouvoir gagner la guerre. À l’oeuvre depuis trois ans, l’Agence européenne de la batterie souhaite développer une filière et combler le retard face à l’Asie. Un fond doté de 2,9 milliards d’euros est prévu. Northvolt est une promesse qui tombe à pic : celle de batteries vertes, bas de carbone lors de la production et recyclables. 

Mais pour valider la stratégie du Suédois, l’UE ne doit pas s’arrêter en chemin. "Northvolt anticipe très fortement les prochaines réglementations européennes sur le projet de recyclage des batteries en 2022, poursuit notre expert. Car dans les conditions actuelles législatives, normatives et économiques, le recyclage, c’est compliqué. En fait, tout le monde sait récupérer les métaux des batteries, le problème c’est le coût de l’opération. En dehors du cobalt et du nickel, aujourd’hui, le recyclage n’est pas du tout rentable.

"L’Europe peut favoriser les opérateurs qui ont les pratiques les plus vertueuses, abonde Nicole Mathieu de l’Idri sur France Culture. Cela passerait par un nouveau règlement qui fixerait les obligations en matière de gestion de ces chaînes d’approvisionnement, de nouvelles obligations relatives à l’environnement et aux enjeux éthiques et une prise en considération de l’empreinte carbone, des émissions en amont de la fabrication du véhicule électrique.

Tesla n'tienne !

Si la promesse Northvolt compte encore sur l’UE pour établir un cadre réglementaire favorable, certains concurrents sont déjà sortis du bois. Tesla se dote d’une grosse usine en périphérie de Berlin et promet une capacité de production mondiale pour 2022…, trois fois supérieure à celle de Northvolt en 2024. Le leader mondial chinois CATL prévoit aussi de s’implanter en Allemagne avec une usine dopée. Les champions européens sont peut-être déjà là. 

Pierre-Henri Girard-Claudon

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