Violences sexuelles sur mineurs : une proposition de loi discutée à l'Assemblée nationale
Ce lundi 15 mars sera étudiée en seconde lecture par les députés une proposition de loi contre les violences sexuelles sur mineurs. Prescription prolongée, seuil de non-consentement à 15 ans, etc. Voilà ce que changera cette loi.
Annoncé début février par le garde des Sceaux Eric Dupond-Moretti, une proposition de loi, adoptée en première lecture par les députés, contre les violences sexuelles sur mineurs va être examinée ce lundi 15 mars à l'Assemblée nationale en seconde lecture. Une proposition qui arrive dans un contexte de libération de la parole quant à ces crimes sexuels notamment avec le mouvement #Metooinceste sur les réseaux sociaux.
Ce texte vise à renforcer la protection des mineurs face à ces violences sexuelles. Pour cela, cette proposition souhaite modifier le droit actuel sur plusieurs points.
Seuil de non-consentement à 15 ans et "viol incestueux"
Actuellement, une condamnation pour viol ou agression sexuelle suppose que les juges démontrent une absence de consentement à travers les notions de "violence, menace, contrainte ou surprise". Cette démonstration ne sera plus à faire pour les victimes âgées de 15 ans et moins. Constituerait donc un viol "tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit, ou tout acte bucco-génital commis par un majeur sur la personne d’un mineur de quinze ans et moins, même si ces actes ne lui ont pas été imposés par violence, contrainte, menace ou surprise".
Autre point : la définition et la qualification de viol "incestueux". Ainsi la proposition de loi décrit que le viol serait qualifié d'incestueux s'il a été commis par "un ascendant ; un frère, une sœur, un oncle, une tante, un neveu ou une nièce" et le conjoint ou concubin de ces personnes. Cette qualification s'appliquera aussi pour les viols commis par toute personne ayant une "autorité morale ou de fait" (par exemple un concubin) sur la victime mineure, dont le seuil de non-consentement sera alors porté à 18 ans.
Qu'il soit incestueux ou non, le viol sur mineur sera puni de 20 ans de réclusion criminelle. Quand aux délits d'agressions sexuelles, c'est-à-dire "toute atteinte sexuelle autre qu’un viol commis par un majeur sur la personne d’un mineur", ils seront punis de dix ans d’emprisonnement et 150.000 euros d’amende.
La clause "Roméo et Juliette"
Afin de protéger les "amours adolescentes", la proposition de loi du gouvernement a introduit une clause surnommée "Roméo et Juliette". Celle-ci vise surtout à ce que les relations tissées à l'adolescence ne tombe pas sous le coup de la loi dès lors qu'un des partenaires atteint la majorité.
Il y aura toutefois pénalisation si l'écart entre les partenaires est de plus de cinq ans et la clause ne s'appliquera pas "dès lors que les conditions habituelles du viol et des agressions sexuelles sont réunies". Concrètement, "si un garçon de 18 ans profite de l'alcoolisation d'une gamine de 14 ans pour la violer dans son sommeil, il n'aura pas d'impunité : on pourra toujours faire valoir qu'elle a été violée", souligne à Paris Match Carine Durrieu-Diebolt, une avocate spécialisée dans la défense des victimes de violences sexuelles.
Mais cette clause ne ravie pas tout le monde. Pour l'association Collectif pour l'enfance, cette clause déroge à la règle du non consentement de l’enfant de moins de 15 ans. Elle réclame un nouvel amendement. Une position partagée par l'association Enfance Majuscule.
Prescription "glissante" et éloignement des mineurs
Par ailleurs, si la loi Schiappa, passée en 2018, prévoit déjà que pour les viols sur mineurs le délai de prescription est de 30 ans à compter de la majorité de la victime, la proposition de loi souhaite que "lorsque, avant l’expiration de ce délai, l’auteur d’un viol commis sur mineur commet un nouveau viol sur un autre mineur, le délai de prescription du premier crime est prolongé, le cas échéant, jusqu’à la date de prescription du nouveau crime".
Enfin, avec cette loi, les juges pourront ajouter une "peine complémentaire d’interdiction d’une activité professionnelle ou bénévole impliquant un contact habituel avec des mineurs" contre les adultes reconnus coupables de crimes et délits sexuels sur mineurs.
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