Vaccination : en France, les enseignants s'impatientent
Deux mois après la promesse du ministre de l'Education, Jean-Michel Blanquer, de vacciner les enseignants "d'ici mars au plus tard", la profession s'inquiète qu'aucun calendrier n'ait pour l'heure été annoncé.
Alors que l’extension des vaccins aux personnes âgées de plus de 50 ans qui présentent des comorbidités a été annoncée mardi, les enseignants attendent toujours leur première injection, promise par le ministre de l’Éducation nationale Jean-Michel Blanquer le 4 janvier dernier.
"Les enseignants font partie des professionnels de premier rang, après les personnels soignants. Il y a d'abord les personnes âgées, les soignants, et puis il y a certaines catégories, dont les professeurs font partie", avait-il d'abord affirmé, dimanche 3 janvier sur BFMTV. Puis c'est sur Europe 1 qu'il avait promis, le lendemain, une vaccination "au mois de mars au plus tard". Mais depuis, deux mois ont passé et aucun calendrier n’a été avancé.
Frédérique Rolet, secrétaire générale du syndicat enseignant majoritaire SNES-FSU, pointe un décalage entre le discours du ministre et les calendriers annoncés par le ministère de la Santé, Olivier Véran. A ce titre, elle déplore une minoration du risque de contagion dans les collèges et les lycées : "Si d'un côté, on fait de l'école une cause nationale en affirmant l'importance de ne pas fermer les établissements, il faut que de l'autre, les moyens suivent pour permettre une meilleure protection des agents."
Manque de transparence
Confrontés à des élèves avec lesquels la distanciation sociale s'avère compliquée, de nombreux professeurs des écoles s'inquiètent de leur exposition. Au lycée Baudelaire de Roubaix, comme dans d'autres lycées du territoire, un système de cours en demi-groupes a été mis en place depuis octobre pour répondre à l'anxiété générale. "Nous avons dû choisir entre le pédagogique et le sanitaire", déplore Tiphaine Colin, professeure de SES et représentante SNES-FSU.
Lors de l'annonce de Jean-Michel Blanquer du 4 janvier, les syndicats avaient déjà estimé que l'échéance annoncée était trop tardive. Aujourd'hui, Frédérique Rollet insiste : "On souhaiterait qu'il y ait un calendrier clair qui puisse permettre d'accélérer la vaccination de tout le personnel éducatif". En outre, face à un discours ministériel parfois contradictoire, les enseignants sont dans l'incompréhension : "Le mardi, on nous dit 'mars au plus tard', avant de passer à 'avril' le jeudi, puis le dimanche, c'est finalement 'courant du 1er semestre'", déplore Tiphaine Colin.
Si à l'heure actuelle, les enseignants peuvent bénéficier du droit commun, c'est-à-dire de la vaccination autorisée aux plus de 50 ans dans certains cas de comorbidité, l'accès est, en réalité, bien plus complexe. "Actuellement, puisque les médecins de travail se font rares dans l’Éducation nationale, les enseignants devraient faire appel aux médecins de ville", explique la secrétaire générale, qui dénonce également un "manque de transparence" sur lesdites comorbidités concernées par l'accès au vaccin. "Nous sommes censés être vaccinés sur notre lieu de travail, mais où exactement ? Est-ce que ce sera sur notre temps de travail ?", s'interroge à son tour Tiphaine Colin.
La France en retard ?
La priorité donnée aux enseignants est d'autant plus pointée du doigt en France qu'outre-Atlantique, le président des États-Unis a affirmé mardi l'urgence de vacciner la communauté éducative, à travers un plan massif qui doit s'étaler sur le mois de mars. "Aujourd'hui, je demande à chaque État de donner la priorité aux éducateurs pour la vaccination, a-t-il déclaré dans un tweet. Nous voulons que chaque éducateur, membre du personnel scolaire et travailleur de la petite enfance reçoive au moins un vaccin d'ici la fin du mois."
Même constat un peu plus au sud, où le Chili a annoncé la vaccination de ses enseignants en vue de la rentrée scolaire. A l'heure actuelle, seuls les soignants, les pompiers et les personnes âgées de plus de 50 ans avec certaines comorbidités, ont accès au vaccin contre le Covid-19, en France. D'après les conclusions de la réunion sanitaire ministérielle organisée ce mardi, les enseignants resteraient, quant à eux, cantonnés à la "troisième phase" de la vaccination prévue pour fin mars, début avril. En espérant que d'ici là, une logistique soit enfin mise en place.
Rachel Rodrigues