Tinder : nos matchs pourront-ils un jour consulter notre casier judiciaire ?
L’application de rencontres Tinder a annoncé ce lundi 15 mars qu'elle va permettre à ses utilisateurs américains de vérifier si leur interlocuteur possède un casier judiciaire pour violences. Une mesure qui paraît inapplicable en France.
La célèbre application de rencontres Tinder va permettre dès cette année à ses utilisateurs américains de vérifier si leur interlocuteur possède un casier judiciaire pour violences, a-t-elle annoncé dans un communiqué ce lundi 15 mars. Seuls le nom de son “match” et son numéro de téléphone seront nécessaires pour consulter ses antécédents judiciaires.
La société américaine Match Group, qui détient Tinder, s’est associée à l’organisation à but non lucratif Garbo pour mettre en place cette nouvelle fonctionnalité. Fondée par des femmes, Garbo compile “les casiers judiciaires et signalements de violence ou d'abus, dont les arrestations, les détentions, les interdictions d'approcher, les harcèlements et autres crimes violents."
Une mesure “compliquée” à mettre en place en France
Une mesure qui serait “très compliquée” à mettre en place en France, explique Laure Landes-Gronowski, avocate en droit des technologies de l'information et de la protection des données à caractère personnel. Deux textes rendraient en effet son application impossible de notre côté de l'Atlantique : “Le Règlement général sur la protection des données (RGPD) et la loi que l’on appelle “Informatique et liberté”. Ces deux textes prévoient que la collecte de données d'infraction ou de condamnation soit interdite, sauf exceptions.”
La consultation du casier judiciaire est très réglementée en France et ne peut s’effectuer que sous certaines conditions. Seuls les magistrats, les établissements pénitentiaires, certaines administrations ou organismes privés y ont accès. Un employeur peut demander à consulter un extrait du casier judiciaire uniquement si l’emploi exige un passé pénal irréprochable. c’est le cas pour travailler en tant qu’agent(e) de sécurité ou assistant(e) maternel(le) par exemple.
Le droit à l’oubli
La décision de Tinder de donner accès aux casiers judiciaires de ses utilisateurs soulève aussi plusieurs questions d’éthique, notamment celle du “droit à l’oubli” selon Laure Landes-Gronowski. “Je trouve que l'objectif [de cette mesure] est parfaitement louable et, en même temps, on a tous le droit à la protection des données à caractère personnel.”
L’avocate et experte dans la prévention et la gestion de la cybercriminalité Sylvie Jonas partage le même avis : “La plateforme Garbo a été créée par des femmes, pour les défenses des femmes. Cela m'interpelle parce qu’il y a toujours une opposition entre le droit à l'information des utilisateurs et le droit au respect de la vie privée.”
Un bouton d’urgence si le "date" tourne mal
En 2020, Tinder avait déjà ajouté un bouton d’urgence à l’application, permettant d’envoyer ses données de géolocalisation à des services de secours si un rendez-vous tournait mal. Un an plus tôt, une alerte à destination des personnes LGBTI+ avait également été ajoutée pour qu’un signal leur soit envoyé si elles se trouvaient dans un pays leur étant hostile.
Julie Tritschler