"On l'aura cette journée" : les familles de victimes du Covid-19 se mobilisent pour un hommage national
Un an après le début de la pandémie de Covid-19, 87.000 personnes sont mortes du Covid-19 en France. Certaines familles de victimes réclament une journée de deuil national pour leur rendre hommage, sans succès pour le moment.
"Mon épouse est décédée le 29 mars 2020 du Covid-19, à l’âge de 66 ans." Lionel Petitpas, 71 ans, vit à Cormontreuil dans la Marne (Grand Est). Après la mort de sa femme, il a créé l’association "Victimes du Covid 19", pour réclamer au gouvernement une journée de deuil national pour rendre hommage à nos morts de la pandémie.
"Quand on m’a annoncé que ma femme était décédée, ma fille et moi avons demandé à la voir. Ça nous a été refusé. Je n’ai pas pu assister à la mise en bière, l'ambulance est venue la chercher dans la nuit du 23 mars, et je ne l'ai plus jamais revue. Nous avons dispersé ses cendres le 3 avril." Dès lors, très difficile pour lui - et pour les familles qui ont vécu cette situation - de faire son deuil. "Ça a été un gros choc émotionnel, il m’a manqué des étapes. J’en suis même venu à me demander si c’étaient bien les cendres de ma femme que je dispersais."
"On avait une telle peur panique de la maladie, qu’on a traité les morts comme des pestiférés." Lionel Petitpas a tout de suite cherché à mettre son désarroi au profit des personnes qui, comme lui, ont vu leurs proches emportés par le Covid. "Je suis très en colère contre le gouvernement qui n’a pas su gérer la situation. Souvenez-vous, à une époque on nous a dit que les masques étaient inutiles, voire dangereux !"
"On l’aura, cette journée"
Le jour du décès de son épouse, il a écrit une lettre au député et au sénateur de sa circonscription de la Marne, "pour les mettre face à leur responsabilité de dirigeants politiques". Le 2 avril, il a lancé la pétition « Pour que les personnes décédées du Covid-19 ne tombent pas dans l’oubli », qui a récolté 33.806 signatures depuis. Et le 16 mai, la création de son association paraissait dans le Journal Officiel. "Dans la foulée, j’ai lancé une page Facebook, pour pouvoir m’exprimer et laisser un espace de parole pour d’autres personnes dans le même cas que moi."
Pour demander une journée de deuil national, Lionel Petitpas a écrit à Emmanuel Macron, mais également à différents ministres. "Ils ont transmis mes courriers à Olivier Véran, qui ne m’a jamais répondu. Pourtant ce qu’on demande, c’est simplement une reconnaissance morale et un hommage, on ne demande aucune compensation financière, ce n’est pas compliqué à mettre en place."
Le 30 avril 2020, l’avocat et élu au conseil municipal de Courbevoie (Hauts-de-Seine), Arash Derambarsh avait déjà interpellé Emmanuel Macron à travers une tribune publiée dans la revue La Règle du jeu. Ayant perdu son père le 31 mars, des suites du Covid-19, il s’est fait le porte-voix de celles et ceux qui ont vécu ce drame : "Pour les proches ainsi que les familles, cette situation est déshumanisante et d’une tristesse si profonde. (…) Nous pouvons en notre âme et conscience honorer nos morts en décrétant un deuil national."
A l’étranger, certains gouvernements ont déjà rendu hommage à leurs victimes. Le 26 mai 2020, l’Espagne a déclaré dix jours de deuil national pour les 25.000 personnes décédées du Covid à l’époque. Le 28 février 2021, Joe Biden a observé une minute de silence pour honorer les 500.000 Américains ayant succombé au virus. " On l’aura cette journée, je peux vous le dire. C’est mon principal objectif désormais ", assure Lionel Petitpas.
Marion Mayer