L'inauguration d'un parc d'attractions Mario, couronnement du rebond de Nintendo

Le parc d'attractions Super Nintendo World, qui exploite l'univers du célèbre plombier moustachu, a ouvert ce jeudi au Japon. Un événement qui survient dans un contexte florissant pour le groupe japonais, qui a notamment profité des confinements.

Faire une course de kart au milieu du château de Bowser, collecter des pièces en frappant des blocs ou se glisser dans un tuyau vert grandeur nature, c'est désormais possible depuis ce jeudi 18 mars. L'univers de Mario s'invite dans le premier parc à thème Nintendo au sein du parc Universal Studios Japan, à Osaka, dans l'ouest du Japon.

Initialement prévue pour 2020, afin de coïncider avec les Jeux Olympiques de Tokyo, reportés à 2021 en raison de la pandémie de Covid-19, l'ouverture de ce Super Nintendo World a été plusieurs fois décalée. Elle a cette fois bien eu lieu dans le respect des gestes barrières et avec une jauge de 10.000 spectateurs par jour.

Un moyen d'exploiter ses franchises

L'exploitation au-delà du jeu vidéo de l'univers Mario vient couronner une année de chiffres records pour l'entreprise japonaise, qui n'a pas toujours été au sommet ces dernières années. La décision de créer ce parc a été prise il y a cinq ans alors que Nintendo était en perte de souffle. La firme japonaise était alors en difficulté face à ses rivaux, avec des revenus et parts de marché en déclin depuis 2010. La naissance d'un parc devait alors surtout servir à exploiter les franchises (Super Mario, Mario Kart, Yoshi...) au-delà des consoles. "D’une manière générale, les parcs d’attractions autour des marques sont plus là pour les faire vivre que pour gagner de l’argent et Nintendo possède parmi les plus belles marques du monde", explique Charles-Louis Planade, analyste jeux vidéos pour la société de courtage TP ICAP. Nintendo venait alors d'accuser le coup de l'échec de sa console Wii U et cherchait également à prendre le virage des jeux sur mobile, avant de sortir le jeu pour mobiles Pokémon Go.

Les confinements ont profité à l'industrie du jeu vidéo

Le succès mondial de la Switch, sa nouvelle console sortie en 2017, a fait remonter la pente à Nintendo. En un an, de mars 2017 à mars 2018, le groupe a vendu plus de Switch qu'escompté, sans pour autant revenir aux chiffres atteints avec la Wii en 2007.

C'était sans compter sur la pandémie de Covid-19. "Tout le monde a été gagnant dans l'industrie du jeu vidéo l'année dernière", abonde Charles-Louis Planade. En février dernier, Nintendo a relevé ses prévisions pour l'année fiscale qui se terminera le 31 mars prochain, et dont les résultats seront publiés en mai 2020. La firme prévoit un chiffre d'affaires annuel en hausse de 22% et un record de ventes pour la Switch depuis son lancement. En décembre, son cours de bourse a flirté avec les sommets de 2007.

À quoi Nintendo doit-elle cette performance impressionnante ? D'abord, le mode de vie sédentaire imposé par les confinements a incité de plus en plus de personnes a s'adonner aux jeux vidéos. Nintendo a profité de l'arrivée de ces nouveaux joueurs, qui ne sont pas de purs gamers. "Le secteur du jeu vidéo s'est démocratisé, les jeux s'adressent à tout le monde", analyse Charles-Louis Planade, et les nouveaux joueurs "trouvent dans Nintendo ce qu'ils souhaitent".

Des franchises puissantes

Le succès de la firme nippone l'année passée repose aussi sur ses fameuses franchises. "La promesse de Nintendo a été de s’appuyer sur des franchises universelles, intergénérationnelles et d’avoir su réinventer le jeu", explique Charles-Louis Planade, en référence aux jeux intemporels comme Animal Crossing. Ce jeu de simulation de vie sur une île, loin de l'ambiance morose du confinement, a en effet contribué à la forte croissance des ventes de Switch, pourtant dans sa quatrième année de commercialisation : sa nouvelle version pour cette console, New Horizons, est sortie le 20 mars 2020 dans le monde, en pleine flambée de la pandémie. Nintendo fait vivre ses univers mais sait aussi réinventer l'outil de jeu : "Le succès de Nintendo vient de la qualité de ses consoles", affirme l'analyste.

Un pas important dans l'évolution de Nintendo

L'ouverture du parc est donc en quelques sorte le point culminant d'un rebond et la conclusion d'une année de tous les records pour l'entreprise nippone. C'est aussi un pas important dans l'exploitation de ses fameuses franchises, une propriété intellectuelle très chère aux yeux de Nintendo, qui a donc été très prudente dans son choix de s'associer à Universal Studios Japan : "Depuis les années 80, Nintendo a compris que ce qui faisait sa force, c’était ses marques de jeu. Et donc, ils sont toujours très précautionneux quant à leur usage en dehors de leur univers", précise Charles-Louis Planade. Son pari reste de toute façon limité : les revenus liés au parc, qui a coûté près de 460 millions d'euros, ne devraient représenter qu'une petite partie du business historique de l'entreprise.

Anna Lippert