Affaire Khashoggi : l'Arabie saoudite visée par une plainte pour "crimes contre l'humanité"
Alors que l’Arabie saoudite tente d’effacer l’affaire Jamal Khashoggi, plus de deux ans après l'assassinat du journaliste dans l’ambassade saoudienne en Turquie, les nouvelles accusations des États-Unis et la plainte de Reporters sans frontières (RSF) en Allemagne rappellent l'implication meurtrière du prince héritier.
Quelques jours après la publication du rapport du renseignement américain qui accuse Mohammed ben Salmane (MBS), à la tête de l'Arabie saoudite, d’avoir “validé” l’assassinat de Jamal Khashoggi, c’est au tour de Reporter sans frontières de déposer une plainte inédite en Allemagne pour crimes contre l’humanité visant Ryad.
L’ONG cible Mohammed ben Salmane et son équipe, dont Maher Mutreb, officier du renseignement à la tête de “l’équipe qui a torturé et tué” le chroniqueur du Washington Post dans le consulat saoudien d'Istanbul le 2 octobre 2018.
1.000 coups de fouet et 10 ans de prison
Lundi 1er mars, Reporters sans frontières a évoqué une “persécution généralisée et systématique des journalistes en Arabie saoudite” auprès de la Cour fédérale de justice de Karlsruhe, compétente sur les crimes internationaux.
L’ONG détaille les exactions commises contre 34 journalistes emprisonnés entre 2011 et 2019. Parmi eux, le blogueur Raif Badawi, défenseur de la liberté d’expression, est toujours emprisonné après avoir été condamné en 2014 à 1.000 coups de fouet et 10 ans de prison pour “insulte” à l’islam.
RSF espère l’ouverture d’une enquête, qui serait une “première mondiale” et l’émission de mandats d’arrêt pour juger les actes de “torture”, “violence”, “coercition sexuelle”, “disparition forcée”, “privation illégale de liberté physique”, qualifiés de “crimes contre l’humanité” par l'ONG.
“Punir” Mohammed ben Salmane
La fiancée turque de Jamal Khashoggi a salué cette action et réitéré son appel à “punir” le prince héritier à la tête de l’Arabie saoudite.
Après avoir un temps nié cette opération, Ryad affirme aujourd’hui qu’elle est le fait d’agents saoudiens ayant agi seuls. Cinq saoudiens ont ainsi été condamnés à mort et trois autres à des peines de prison.
Condamnation parallèle aux États-Unis
En parallèle, ce lundi 1er mars, les États-Unis ont exhorté Ryad à démanteler l’escadron supervisé par l’ex-conseiller de MBS à la Cour royale et impliqué dans le meurtre du chroniqueur.
Cette demande intervient après que le président Joe Biden a publié vendredi 26 février un rapport du renseignement américain que Donald Trump avait jusqu’ici tenu secret. Pour cause, le document accuse son aillé, le prince MBS, d’avoir “validé” l’assassinat.
Les États-Unis ont été critiqués pour leur tiédeur, le gouvernement américain ne sanctionnant pas le prince héritier afin d’éviter une crise ouverte avec le royaume pétrolier.
A l’image de Reporters sans frontières, l’administration Biden appelle dorénavant Ryad à “prendre des mesures supplémentaires” en faveur des droits humains.
Fanny Ruz-Guindos-Artigue