AstraZeneca : pas de débat au Royaume-Uni, qui continue de vacciner
Le Royaume-Uni, le plus important utilisateur du vaccin AstraZeneca, refuse de suspendre sa campagne. Alors que 24 millions de Britanniques ont été vaccinés, aucune augmentation du nombre de thrombose n'a été relevée pour le moment.
Le vaccin AstraZeneca "est sûr et extrêmement efficace", assure Boris Johnson, ce mardi 16 mars dans le Times. Hors de question donc pour le Premier ministre britannique de suspendre la vaccination par AstraZeneca, un sérum en partie concocté par des scientifiques britanniques. Optimiste, Boris Johnson entend plutôt célébrer la réussite de ce que l'on appelle outre-Manche "le vaccin d'Oxford". La première depuis le Brexit et le signe qu'une nouvelle époque commence.
Onze millions de doses d'AstraZeneca injectées
Au Royaume-Uni, onze millions de doses de ce que l'on appelle là-bas "le vaccin d'Oxford" ont été injectées, sans que les autorités ne relèvent d'effets secondaires graves. 24 millions de personnes au total ont été vaccinées, record d'Europe. Et ce matin, les scientifiques britanniques observent, éberlués, l'agitation sur le continent. La veille, la France, l'Allemagne et une dizaine de pays européens ont interrompu les injections d'AstraZeneca, après une série d'alertes sur des cas de thrombose survenus après une vaccination. Aucun lien entre le vaccin et ces thromboses n'a été avéré pour le moment.
Les Britanniques font donc confiance à leur agence de régulation du médicament, la MHRA, la "plus prestigieuse et la meilleure du monde" selon Boris Johnson, qui ne tarit jamais d'éloges sur les institutions de la Couronne. Depuis la fin du mois de décembre, la MHRA n'a relevé aucun effet secondaire grave. Dans son dernier bilan, la MHRA assure avoir pourtant étudié 94,809 "yellow cards" (ndlr : carton jaune), c'est-à-dire des rapports concernant des réactions suspectes. Toute personne peut en réaliser un et ces rapports font tous l'objet d'analyses.
Aucune augmentation du nombre de thromboses
Pour l'heure, la MHRA ne rapporte que des douleurs au niveau du point d'injection, des paralysies faciales momentanées, des allergies liées à la vaccination... Surtout, alors qu'un quart de la population a reçu une injection, "il n’existe pas de différence notable entre le nombre de thromboses chez les vaccinés et la population générale", insiste le professeur Anthony Harnden, chef adjoint du comité sur la vaccination et l’immunisation.
La thrombose, qui correspond à la formation anormale d'un caillot dans le sang, est une pathologie extrêmement courante. Toutes les 37 secondes, une personne meurt d'une thrombose dans un pays occidental. 3.000 personnes meurent à cause d'un caillot sanguin, chaque mois au Royaume-Uni. AstraZeneca ne rapporte que 15 thromboses et 22 embolies pulmonaires sur les 15 millions de doses injectées au Royaume-Uni et dans l'Union.
Pas d'interruption d'une vaccination accélérée
Alors que 125.000 personnes sont mortes du Covid-19 au Royaume-Uni, avec un variant plus dangereux apparu dans le Kent, les autorités n'entendent donc pas freiner la campagne de vaccination massive qui a été lancée à la fin du mois de décembre. Le gouvernement de Boris Johnson a fait le pari de commander 400 millions de vaccins auprès de sept potentiels fabricants avant même la fin de leur mise au point, doublant ainsi les autres pays européens qui ont été contraints d'attendre l'autorisation de l'Agence européenne du médicament. Ils n'ont retenu que deux vaccins (Pfizer et AstraZeneca), avec un objectif : injecter au moins une dose à tous les adultes d'ici la fin août.
Bilan : ce week-end, plus d'un demi-million de personnes ont reçu une injection au Royaume-Uni, contre à peine plus de 200.000 personnes en France. Tous les citoyens de plus de 50 ans auront normalement reçu une dose d'ici la mi-avril. La campagne va encore s'accélérer, Boris Johnson espérant faire de son pays le premier à être totalement immunisé. Après près de deux mois de confinement strict, l'épidémie y est contrôlée. Le nombre de nouveaux cas s'est stabilisé autour de 5.000 par jour, quatre fois moins qu'en France. Vivement critiqué jusque-là pour sa gestion de la crise sanitaire, le Premier ministre joue sa réélection. Fin février, sa gestion de la vaccination était approuvée par 85 % des Britanniques, un chiffre inégalé en Europe.
Pierre Lann