Affaire Julie : la qualification pour viol n'est pas retenue, les pompiers sont renvoyés en correctionnelle
La décision de la Cour de cassation était attendue mercredi 17 mars dans l’affaire dite "Julie*". En cause, des rapports sexuels entre plaignante, alors mineure de moins de 15 ans, et une vingtaine pompiers entre 2008-2010. La demande de la plaignante de requalifier les faits en "viol" est rejetée.
La Cour de cassation a rendu ce mercredi 17 mars une décision très attendue dans l’affaire "Julie*", débutée par une plainte de la victime présumée en 2010. Elle rejette la demande de la plaignante qui réclamait que les pompiers soient poursuivis pour viol. Les magistrats de la Cour de cassation cassent toutefois partiellement la décision rendue par la Cour d’appel de Versailles en novembre 2020.
Ils considèrent que les juges en appel ont fait une erreur en ne retenant pas la qualification de "corruption de mineur aggravée par la minorité de 15 ans". Les juges n'ont "pas recherché si les personnes incriminées avaient connaissance de ce que la victime était mineure", motive l'arrêt. Les pompiers incriminés sont donc renvoyés en correctionnelle.
Une affaire qui dure depuis dix ans
Pour rappel, la Cour de cassation devait trancher - en droit, pas en faits - cette affaire qui dure depuis dix ans. Entre 2008 et 2010, alors qu’elle n’a pas 15 ans, Julie*, victime de harcèlement scolaire et sous traitement médicamenteux, est prise en charge 130 fois par les pompiers. Après avoir entamé une relation avec l’un des pompiers, elle finit par avoir des rapports sexuels avec vingt d’entre eux, tous âgés d’une vingtaine d’années. En 2010, elle porte plainte pour viols.
Mis en examens pour "viols sur mineure", les pompiers sont finalement jugés pour des faits "d’atteinte sexuelle sur mineure de 15 ans en réunion" après requalification du juge d’instruction. L’atteinte sexuelle est une infraction qui réprime les relations sexuelles, mêmes consenties, entre un majeur et un mineur - contrairement au viol, commis "avec violence, contrainte, menace ou surprise", la contrainte pouvant être physique et morale. C’est sur le fondement de ce délit d’atteinte sexuelle que trois pompiers ont été renvoyés en correctionnelle par la chambre d’instruction.
La loi Schiappa peut s'appliquer rétroactivement
Nouveauté de cette décision, la Cour considère que dans le cas d'un viol sur mineur, l'appréciation de la « violence, contrainte, menace ou surprise » qui caractérise le viol, se fait à l'aune des critères de la loi Schiappa et ce, même si les faits sont antérieurs à l'entrée en vigueur de la loi en 2018.
Cette évolution était à prévoir, en février la Cour avait estimé qu'il fallait apprécier "l’existence ou de l’absence du consentement de la plaignante au regard d’un nouveau texte, la loi Schiappa d’août 2018".
La loi dite Schiappa, a complété en 2018 la définition des agressions sexuelles sur mineurs de 15 ans. La contrainte morale ou la surprise peuvent désormais être caractérisées "par l’abus de vulnérabilité de la victime ne disposant pas du discernement nécessaire pour ces actes". Cette loi est désormais susceptible de s'appliquer rétroactivement.
* Prénom d'emprunt, la victime étant mineure au moment des faits.
Le Bouillon