Affaire Baylet : pourquoi la justice ouvre-t-elle des enquêtes sur des faits prescrits ?

La brigade des mineurs est en charge de l’enquête qui vise Jean-Michel Baylet, l’ancien président du parti radical de gauche, depuis le 9 juin 2020. Crédit : Flickr.

Jean-Michel Baylet, ancien ministre et président du groupe La Dépêche du Midi, est accusé de “viols” et “agressions sexuelles” sur mineur de moins de 15 ans. Des faits qui remonteraient à 41 ans sur lesquels enquête pourtant le parquet de Paris.

Les faits “se seraient déroulés il y a 41 ans” selon l’avocat de Jean-Michel Baylet, l’ancien ministre radical de gauche accusé de "viols" et "agressions sexuelles" sur mineur de moins de 15 ans. A priori prescrites, ces agressions présumées font néanmoins l’objet d’une enquête par le parquet de Paris. Une révolution juridique impulsée par le ministre de la Justice, Eric Dupond-Moretti.

Le garde des sceaux, qui s'est engagé auprès des associations de droits des enfants et des militantes féministes à apporter de nouvelles réponses aux victimes de violences sexuelles, a en effet demandé ce lundi 1er mars aux procureurs de généraliser les ouvertures d’enquêtes, même si les faits sont prescrits.

Trouver et protéger les victimes

Si ces enquêtes ont peu de chance d’aboutir à une condamnation, faute de preuves, elles permettent dans un premier temps de vérifier les faits puis de rechercher d’autres victimes pour qui les faits pourraient encore être jugés.

Cette recherche est d’autant plus importante que les accusés sont encore au contact d’autres enfants. C’est une enquête de ce type qui avait permis la condamnation du père Preynat en 2020. Prêtres, entraîneurs, professeurs ou grand-parents ayant reconnu ces crimes peuvent ainsi être écartés des mineurs.

Pallier la prescription

Au-delà des recours juridiques, ces enquêtes permettent de donner une réponse à des victimes souvent isolées. Des victimes à qui l’on propose une rencontre avec l’agresseur présumé qui donne parfois lieu à des aveux ou des excuses. Il s’agit aussi de confronter les agresseurs présumés aux faits et à leurs conséquences, à défaut d’être condamnés.

En France, les délais de prescription font toujours débat. Allongés à 10 ans pour les agressions sexuelles sur mineur et 30 ans après la majorité pour les viols, ils ne s’appliquent pas aux faits déjà prescrits en août 2018, date du vote de la loi sur les violences sexuelles et sexistes.

Fanny Ruz-Guindos-Artigue

EDIT : Le garde des sceaux, Eric Dupond-Moretti a justifié sa volonté d'ouvrir ces enquêtes auprès du Point après la publication de notre article. "S’agissant de la prescription, je suis favorable à ce que des enquêtes soient menées y compris pour des affaires a priori prescrites, a-t-il détaillé ce mardi 2 mars. D’abord parce que la prescription n’est pas toujours évidente. Ensuite parce que ces enquêtes sont utiles aux victimes : elles peuvent aboutir à découvrir d’autres faits et les aider à se sentir entendues et prises en considération. Enfin parce que l’enquête peut aussi établir l’innocence d’une personne accusée à tort."

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