Birmanie : la répression militaire condamnée par le Conseil de sécurité de l'ONU

Dans une déclaration unanime, comprenant donc la Chine et la Russie, le Conseil de sécurité des Nations unies a demandé à l'armée birmane de "faire preuve de la plus grande retenue".

Les répressions militaires, provoquées par le coup d'État du 1er février qui a renversé la dirigeante birmane Aung San Suu Kyi, continuent ce jeudi 11 mars malgré une pression internationale. Les quinze pays membres du Conseil de sécurité des Nations unies (ONU), dont la France, se sont mis d'accord pour établir une condamnation "ferme" des actes de violence commis par les généraux birmans sur les civils. Même la Chine, qui n'a pas l'habitude de se mêler à des conflits extérieurs, appelle cette fois-ci au "dialogue".

"Un coup de théâtre" à l'ONU

La journée de mercredi 10 mars s'est achevée sur une condamnation "ferme" des Nations unies, l'instauration de sanctions américaines et un appel au "dialogue" de la part de la Chine. Tous réclament "la libération immédiate de toutes les personnes détenues arbitrairement".

Chose surprenante, tous les Etats se sont mis d'accord pour condamner la répression militaire qui a causé une cinquantaine de morts depuis de début des affrontements.

"Un coup de théâtre" pour cette organisation internationale car "il y a quelques jours, les diplomates avaient encore du mal à imaginer qu'ils allaient arriver à un accord, explique Marc Julienne, chercheur au Centre Asie de l’Ifri. Les pays comme la Russie, la Chine, le Vietnam, entre autres, s'opposaient à l'intervention du Conseil du sécurité, considérant toute décision d'un pays tiers comme une interférence." Les Etats du Conseil de sécurité ont depuis réussi à tous se mettre d'accord et demandent aux deux parties de "chercher une solution pacifique" à la crise politique.

D'après le chercheur, la raison est évidente : "Les évènements en Birmanie rappellent les manifestations réprimées à Hong Kong ou la persécution politique en Russie. Tous ces pays font l'objet de polémiques internationales concernant les droits de l'homme et ils ne veulent pas d'interférence internationale."

La déclaration qui appelle à "faire preuve de la plus grande retenue" ne mentionne pas pour autant la possibilité de sanctions internationales, ce qui permet aux pays alliés de la Birmanie de rester prudents. C'est notamment le cas de la Chine, à la frontière de la Birmanie.

La stabilité de la Birmanie : une priorité chinoise

La Chine, fidèle à sa ligne diplomatique, "n'a pas envie de se prononcer de manière tranchée sur le conflit interne en Birmanie car elle ne voudrait pas qu’on face la même chose chez elle mais, d'un autre côté, elle s'inquiète", explique Marc Julienne.

"L'instabilité politique est quelque chose que la Chine n'aime pas, car on ne sait pas qui prendrait le rôle à la tête du gouvernement et vers où le pays pourrait aller", poursuit-il. Le cas de la Birmanie touche particulièrement la Chine, premier partenaire commercial de cette dernière et sa deuxième source d’investissement après le Singapour. "Si, après la guerre civile, le Myanmar (La Birmanie) décidait de se rapprocher des pays occidentaux, la Chine pourrait perdre son influence sur le territoire", remarque le responsable de l'IFRI. Une influence que la Chine "veut garder car elle a des intérêts énergétiques".

Les approvisionnements énergétiques chinois dépendaient, il y a vingt ans, du détroit de Malacca. Situé près du Singapour, "cet espace large de quelques kilomètres rendait totalement vulnérable la Chine face à une attaque de pirates, à un accident ou à un embargo", détaille Marc Julienne. Afin de contourner cette vulnérabilité, la Chine a développé une stratégie de diversification des approvisionnements. La mise en route, en juillet 2013, du "Shwe gaz, un projet gazier qui traverse tout le Myanmar, fait partie de cette stratégie".

Aux risques de mainmise sur les énergies de la Chine s'ajoute le risque d'une crise humanitaire, aux caractéristiques similaires à celle des Rohingyas, minorité musulmane en Birmanie, qui a fui vers le Bangladesh. "La Chine veut éviter d'avoir la responsabilité de gérer une crise migratoire des Birmans d'une ampleur aussi grande que celle des Rohingyas, qui a été difficile à prendre en charge pour le Bangladesh", conclut Marc Julienne.

Elena García

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