Que faire si l'on est victime de harcèlement scolaire ?
Selon L'Observatoire de la santé, 700.000 élèves sont harcelés chaque année en France. Face à cette situation qui peut mener à des conséquences dramatiques, que peuvent faire les jeunes victimes ? Voici quelques pistes.
Sans que cela aille forcément jusqu'au meurtre, le harcèlement touche 700.000 élèves en France chaque année selon L'Observatoire de la santé. Et d'après une enquête OpinionWay pour l'association e-Enfance, le confinement a eu tendance à aggraver les cas de violence en ligne chez les jeunes : "8 % des adolescents qui ont eu accès à des classes virtuelles ont été témoins de cyber-harcèlement sur ces nouveaux espaces d’échanges." Alors que faire si l'on est victime ?
En parler et conserver des preuves
Le site de l'Education nationale "Non au harcèlement" donne des pistes de solutions pour les élèves victimes. Bien sûr, il faut toujours commencer par en parler. A un membre de sa famille, à l'établissement scolaire et à des camarades de confiance. Briser le silence est la première étape pour faire cesser la violence. En cas d'impasse, il est possible de contacter des numéros verts, comme le 3020 ou le 0.800.200.000, s'il s'agit de cyberharcèlement.
Dans cette situation, l'association e-enfance, qui œuvre beaucoup contre toutes les formes de violences chez les enfants et les adolescents, conseille aux victimes de toujours conserver des preuves, en effectuant des captures d'écran. Il faut également signaler les messages et les posts incriminés. Pour cela, il existe des sites comme celui du ministère de l'Intérieur, Pharos, mais aussi Point de contact.
Enfin, il faut être conscient que le harcèlement scolaire est puni par la loi, avec des peines de prison allant de six à dix-huit mois, et une amende de 7.500 euros. Parmi les circonstances aggravantes : si la victime a moins de 15 ans ou si elle est vulnérable (handicap par exemple), s'il y a eu plus de huit jours de classe manqués ou si les intimidations ont eu lieu via internet. Quand on est victime, porter plainte permet d'emblée de se protéger.
Les parents et les établissements scolaires ont un rôle à jouer
Les victimes de harcèlement scolaire sont souvent jeunes et ne peuvent pas régler la situation seules. Il est donc important que la famille et l'école s'emparent du sujet. Pour cela, "Non au harcèlement" donne des conseils précis au corps enseignant : le dialogue, bien sûr. Pour diagnostiquer des cas de harcèlement, les professeurs ont à leur disposition un guide pour mener des entretiens et une "grille de repérage" : tout un tas de critères sont ainsi à repérer (isolement, moqueries, agressions physiques, refus de venir en classe, anxiété, conduites à risques…) et à noter consciencieusement pour faire remonter le problème.
Les élèves victimes et auteurs peuvent aussi être pris en charge séparément par des conseillers d'orientation psychologues, des infirmiers ou des assistants sociaux. Mais aujourd'hui, il manque par exemple une cinquantaine de conseillers d'orientation en France. De plus, ce personnel n'est pas forcément formé aux questions de harcèlement. C'est pourquoi les élèves peuvent être orientés vers des partenaires du Programme de Réussite Educative, des centres médico-psychologiques ou encore des institutions comme la Maison des Adolescents. Si la situation dégénère, les établissements peuvent en informer le Conseil départemental et le procureur de la République.
Concernant les sanctions, le gouvernement encourage la responsabilisation et la réparation, mais pas forcément l'exclusion qui, très frontale et punitive, peut être contre-productive.
Aux Etats-Unis, des groupes de parole mis en place
Alors que les Etats-Unis sont très sujets aux questions de harcèlement scolaire, en Californie et dans le Colorado, une méthode a été mise au point pour rompre ce cercle infernal. Le 5 novembre 2020, à l'occasion de la Journée mondiale contre le harcèlement scolaire, France 2 a publié un reportage à propos de ce système.
L'idée est d'organiser des réunions autour d'un professeur. Au sein d'un groupe d'élèves, le harceleur est présent, sans savoir que l'enseignant sait tout. L'idée est de l'impliquer dans la solution et de le faire évoluer naturellement. Comme le professeur Bennett Smith, également membre du programme "No Bully", l'explique dans le reportage : "On intègre le harceleur parce qu'on veut déclencher un cercle vertueux, positif. On lui dit : 'Tu es un leader, on t'a choisi pour ça, parce qu'on pense que toi, tu as du pouvoir, tu peux avoir un impact sur la situation'." Une manière de tenter de régler les problèmes de harcèlement scolaire en impliquant directement les premiers concernés.
Le traumatique décès d'Alisha
Lundi 8 mars, Alisha, une adolescente de 14 ans scolarisée au lycée professionnel Cognacq-Jay d'Argenteuil (Val d'Oise) été retrouvée noyée dans la Seine, après avoir été rouée de coups. Les deux suspects, un couple d'élèves du même établissement, âgés de 15 ans, ont été arrêtés. Une enquête pour assassinat a été ouverte par le parquet de Pontoise.
Selon ses proches, Alisha était victime de harcèlement depuis plusieurs semaines déjà. Piratage de son compte Snapchat pour diffuser des photos d'elle en sous-vêtements, menaces de morts de la part du jeune homme, bagarre dans les toilettes du lycée… La situation était connue des autres élèves, de l'établissement ainsi que des parents de l'adolescente. Sa mère avait effectué un signalement auprès du lycée, qui avait renvoyé le jeune homme et prévoyait un conseil de discipline le 9 mars.
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Marion Mayer